Affaire Lambert : les conditions de la voie de fait n’étaient pas réunies

Lorsque l’État prend une décision qui porte atteinte à la liberté individuelle et que cette décision n’est pas manifestement rattachée à un pouvoir qui lui appartient, on parle de « voie de fait ». Les litiges qui opposent les justiciables à l’État sont tranchés par le juge administratif. Mais par exception, le juge judiciaire est le juge des voies de fait.

En l’espèce, les parents de Vincent Lambert avaient saisi le comité des droits des personnes handicapées de l’ONU qui avait donné 6 mois à la France (État signataire de la Convention relative aux droits des personnes handicapées) pour présenter ses observations sur le dossier. Le comité avait également demandé que les soins se poursuivent jusqu’à ce qu’il ait pu examiner la réponse de l’État français. Cependant l’État français avait répondu au comité de l’ONU qu’il n’est pas en mesure de réclamer le maintien des soins. Les parents avaient alors saisi le TGI pour voie de fait mais le tribunal s’est déclaré incompétent.

En appel, le 20 mai 2019, la Cour d’appel de Paris se déclare compétente, considérant que l’État est l’auteur d’une « voie de fait ». Elle condamne l’État français et l’ordonne de prendre toutes les mesures provisoires demandées par le comité de l’ONU. Les soins apportés à Vincent Lambert sont donc maintenus.

Cependant, la Cour de cassation, par sa décision du 28 juin 2019 casse l’arrêt de la cour d’appel qui ordonnait le maintien des soins vitaux prodigués à Vincent Lambert et ne renvoie pas l’affaire devant un nouveau juge. La Cour de cassation déclare la juridiction judiciaire incompétente.

Selon la Cour, la décision, prise par l’Etat, de ne pas déférer à une demande de mesure provisoire formulée par le Comité des droits des personnes handicapées et tendant à la suspension de l’alimentation et l’hydratation entérales d’un patient pendant l’examen de la communication dont il est saisi, d’une part, ne porte pas atteinte à la liberté individuelle dès lors que le droit à la vie n’entre pas dans le champ de la liberté individuelle au sens de l’article 66 de la Constitution, d’autre part, n’est pas manifestement insusceptible d’être rattachée à un pouvoir lui appartenant, en l’état notamment de décisions juridictionnelles validant l’arrêt des traitements à l’issue d’une procédure collégiale telle que prévue par l’article L. 1110-5-1 du code de la santé publique.

Cass Ass. Plen., 28 juin 2019, n°19-17.330,

Partager :